Foot National
·2 décembre 2024
Foot National
·2 décembre 2024
Arrivé cet été à la tête des Girondins de Bordeaux, Bruno Irles a hérité d’un défi colossal : reconstruire une équipe et un staff dans un contexte particulièrement délicat, alors que le club évolue désormais en National 2. L’ancien entraîneur de QRM et de Pau s’est lancé dans ce projet ambitieux avec des objectifs clairs et une vision à long terme. Entre le bilan de ce début de saison, les ambitions en championnat et en Coupe de France, la gestion des critiques extérieures, et l’impact positif d’un joueur comme Andy Carroll dans l’effectif, il se confie sur son quotidien au sein d’un club historique en pleine reconstruction.
Bruno, vous avez pris les rênes des Girondins dans une situation complexe, avec tout à reconstruire. Comment avez-vous abordé ce défi ?
C’est un choix de ma part. Je savais où je mettais les pieds. Ce n’est plus un club professionnel, il évolue au quatrième échelon national. Mais, il possède une grande histoire. Effectivement, il y a tout à reconstruire. Il y a forcément beaucoup de travail notamment avec John Williams sur la partie recrutement. Quand je suis arrivé, le championnat avait déjà repris depuis deux journées. Je n’avais pas de joueurs. Nous sommes en train de mettre en place un projet de jeu, un projet de vestiaire. C’est à la fois chronophage et excitant.
Vous avez dû gérer deux groupes distincts, constituer un nouveau staff et mettre en place un modèle de jeu. Comment s’est déroulé cette phase de construction ?
Elle n’est pas terminée. Elle se déroule au quotidien. Les joueurs sont arrivés au compte-gouttes. Le staff a également été modifié. Le club est en redressement judiciaire. Malheureusement, il y a eu une vague de licenciements. Il faut intégrer les nouveaux. À part mon adjoint, Dado Prso, il n’y a pas grand monde qui me connaissait. Il faut rapidement faire passer les messages parce qu'on a tous les week-ends une obligation de performance vis-à-vis de la compétition.
Pourquoi avez-vous choisi de rejoindre Bordeaux dans un contexte aussi délicat ? Quels ont été les arguments de la direction pour vous convaincre de relever ce défi ?
J’ai été convaincu par deux éléments. C'était une page blanche à écrire avec John Williams (en charge du recrutement, ndlr). Au contraire c'est aussi excitant d'aller chercher des joueurs qui correspondent à ce que l'on veut faire dans cette division. Donc cet aspect défi c'est la première des raisons. La deuxième, c'est que j'ai rejoint un club historique du football français.
Quels sont les objectifs que vous vous êtes fixés cette saison, en championnat et en Coupe de France ?
On ne m’a fixé aucun objectif. Vous savez quand vous arrivez fin août dans un club et que le championnat a déjà démarré, il n’est pas possible d’établir une feuille de route. On avait un premier objectif qui était de redonner le sourire à l’ensemble des amoureux des Girondins de Bordeaux. Ils souffrent depuis plusieurs années. Ils doivent se reconnaître dans l’équipe et prendre du plaisir même si on joue en National 2. Le deuxième objectif, c’est de reconstruire. Pour cela, il va falloir remonter les échelons. On a tous envie de le faire remonter. Maintenant, on verra si on est capable de le faire dès cette année. Pour l’heure, on a pris du retard.
Justement, la masse salariale a été encadrée par la DNCG. Quelles sont les conséquences pour le club ?
La masse salariale des Girondins de Bordeaux est encadrée depuis le début de la saison. Le club est en redressement judiciaire. Les dirigeants travaillent en étroite collaboration avec le tribunal de commerce. On ne peut donc pas faire n’importe quoi. Malgré tout, l’effectif pourra évoluer sans payer outrageusement un joueur et sortir du cadre. Il peut y avoir des départs. Mais aussi, des joueurs peuvent nous rejoindre sous la forme d’un prêt. Aujourd’hui, les Girondins sont très surveillés et encadrés. Tout ce que l'on fait ou ce que l'on doit faire est propre et respectueux pour respecter les décisions du tribunal et de la DNCG.
Bordeaux reste un club sous les projecteurs, avec des critiques fréquentes envers la direction. Comment gérez-vous cette pression en interne, et comment protégez-vous votre groupe de ces turbulences ?
On s’occupe exclusivement du sportif. Bien entendu, la situation sportive découle des problèmes et des tensions qu'il y a pu avoir les années précédentes. L’équipe n’est pas en Ligue 1 ou en Ligue 2 mais en National 2. D'un autre côté, on est conscient aussi que l’on peut réécrire une belle page de ce club historique.
Votre équipe s’est qualifiée pour les 32es de finale de la Coupe de France (victoire 2-0 contre Les Herbiers). Quelle importance accordez-vous à cette compétition ?
Le club est très heureux de disputer la Coupe de France. Avec l’enchaînement des matchs, je peux faire travailler mes joueurs physiquement et tactiquement. Cet été, nous n’avons pas eu de préparation estivale, donc ça permet à l’équipe de rattraper son retard. Pour l’heure, on n’a toujours pas joué devant nos supporters dans la compétition. On a cœur de leur offrir une affiche afin de partager une rencontre contre un adversaire prestigieux avec eux dans cette belle compétition.
L’arrivée d’Andy Carroll a été marquante. Comment son expérience et son leadership impactent-ils le groupe ?
Au niveau de l’état d’esprit, il est irréprochable. Il a rejoint les Girondins de Bordeaux en respectant les conditions du club notamment sur le plan financier. Les joueurs qui viennent chez nous aujourd'hui ne viennent pas pour cet aspect-là. Il correspond très bien à ce que l'on souhaite mettre en place. Il prend du plaisir au quotidien. C'est ce que les joueurs sont venus chercher. C'est ce que l'on veut transmettre et faire transpirer auprès de nos supporters.
Après plusieurs mois à la tête de l’équipe, quel bilan tirez-vous de ce début de saison, tant sur le plan sportif qu’humain ?
L’équipe réserve, qui évolue en National 3, a été aidé par des anciens joueurs comme Rio Mavuba et Paul Baysse. Ils ont pris une licence pour pas qu’on ait de problèmes administratifs. Il y avait aussi cet aspect-là à prendre en compte. On peut tirer un bilan, mais ce n’est pas terminé. Ça veut dire que mon recrutement n'est pas terminé. Un entraîneur des gardiens est récemment arrivé. En janvier, l’effectif pourrait être renforcé par un ou deux joueurs. Donc, on est toujours dans cette phase de construction. On n'est pas sur notre rythme de croisière. Je pense que l’on pourra l’avoir en février. Malgré tout, on avance bien parce qu'on a on a mis les bases au niveau de l'état d'esprit. Avec le travail que l'on peut faire au quotidien avec le staff, on arrive à gagner des matchs pour se rapprocher du haut du tableau.
Le championnat de National 2 est assez particulier. Quel regard portez-vous sur le niveau de ce championnat et ses spécificités ?
À l’image du National, il a beaucoup évolué. Il y a de très bons joueurs car ils ont été formés par les clubs professionnels. Avec le passage de vingt à dix-huit équipes en Ligue 1 et en Ligue 2, il y a un ruissellement des joueurs sur les troisième, quatrième et cinquième divisions françaises. Forcément, le niveau augmente. Aujourd’hui, c'est très compliqué parce que vous avez beaucoup de bons clubs avec des moyens. Dans notre groupe, vous avez des formations avec des budgets supérieurs à nous. Quand je parle de budget, j’évoque la masse salariale. À l’issue de la saison, les vainqueurs de groupes (soit trois équipes, ndlr) seront promus en National. La tâche sera difficile, mais il va falloir se battre jusqu’au bout.
Les supporters des Girondins vivent une saison particulière, souvent privés de déplacements ou confrontés à des matchs à huis clos. Quel message souhaitez-vous leur adresser dans ce contexte ?
Oui, la situation est difficile. On évolue en National 2. Je parle au nom des joueurs et du staff, on a toujours senti beaucoup de bienveillance à notre égard. Concernant les interdictions de déplacement, il y a eu des erreurs. Si la préfecture prend des décisions, elle ne les prend pas de gaieté de cœur. Les supporters doivent créer une dynamique positive et faire en sorte que les institutions qui les empêchent aujourd'hui de nous suivre puissent changer d’avis. Nous, nous sommes meilleurs avec eux, c'est un fait. On est peiné de ne pas pouvoir partager plus souvent des moments avec eux, notamment à l’extérieur. Maintenant, on doit faire avec pour le moment. À nous et à eux de montrer que la beauté du football peut faire changer certaines attitudes.
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