UltimoDiez
·12 août 2020
UltimoDiez
·12 août 2020
Signer au PSG, tous les gamins d’Île-de-France en rêvent. Mais y jouer en professionnels, c’est une autre histoire. Alors on s’ouvre au reste du pays. Sauf quand ce dernier ne veut pas de nous. Cédric Kipré a été formé en France, et pourtant, c’est en Grande-Bretagne qu’il s’est fait un nom. Le défenseur franco-ivoirien, marqué par son passage en Écosse, est tombé amoureux de l’Angleterre. La fin de saison cauchemardesque de Wigan, relégué en D3, n’entache en rien son CV. La Premier League connaît son nom. Entretien avec un expatrié comblé loin de chez lui.
Ultimo Diez – Ta saison s’est terminée le 22 juillet dernier. Les vacances, pour toi, c’est déjà terminé ?
Cédric Kipré : Oui, j’étais parti 3-4 jours à Malte. Je suis revenu sur Paris chez mes parents, je me repose un peu. Je repars lundi ou mardi (hier, ndlr), avec la reprise pour mercredi (aujourd’hui).
Tu as intégré le centre de formation du Paris Saint-Germain à l’âge de 13 ans. Comment t’ont-ils repéré ?
J’avais fait les essais. J’étais en benjamins je crois. Avant ça, j’étais à Bougival (Yvelines). J’ai passé le premier, deuxième, troisième tour et finalement, ils m’ont fait signer. J’y suis resté 3-4 ans. J’ai ensuite fait une année en U17 Nationaux, à l’ACBB (Athletic Club de Boulogne-Billancourt).
Tu as de bons souvenirs du PSG ?
Oui, j’y ai passé de bonnes années. J’y ai beaucoup appris. Avant, je ne jouais qu’au niveau départemental. Là, j’ai découvert le niveau régional. C’était un changement. J’ai joué avec des bons joueurs, qui sont de grands joueurs aujourd’hui (Adrien Rabiot, Kingsley Coman, ndlr).
Tu pars ensuite pour l’Angleterre à 17 ans…
Oui, j’avais 16-17 ans. Je pars d’abord à Stoke City où j’ai fait un essai. Au bout d’une semaine, ils veulent me faire signer. Mais au bout d’un mois, le coach des U21 dit à mon agent que je suis trop « lazy », trop flemmard, et que ça ne va pas le faire. Après, c’est ce que mon agent m’a dit… Je ne sais pas ce qui s’est vraiment passé. Quelques jours après, je suis parti à Leicester où j’ai signé un contrat.
Pourquoi te retrouves-tu en Angleterre ? Tu n’avais pas de propositions en France ?
J’avais fait une bonne saison en U17 Nationaux, j’avais même reçu une lettre de Guingamp. Je devais aller là-bas. Et bizarrement, quand la date approchait, le directeur du centre ne répondait plus. Je crois qu’il ne voulait plus que je vienne… J’ai aussi fait un essai à Angers, ça ne l’a pas fait. Ils m’ont fait jouer latéral droit, je ne sais pas trop pourquoi… En deuxième mi-temps, j’ai joué dans l’axe mais je n’ai pas très bien joué. Angers, ça ne l’a donc pas fait non plus.
Mais à ce moment-là j’étais encore au lycée, et j’étais dans une section internationale. Donc on devait faire un stage à l’étranger. J’ai fait le mien à Londres. C’est là que j’ai rencontré un agent. Je l’ai rencontré dans un train (voir son entretien à Goal pour en savoir plus). Depuis, on est restés en contact. À la fin de la saison scolaire, il m’a rappelé pour que je vienne en Angleterre faire des essais.
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L’adaptation à l’Angleterre, ça n’a pas été trop difficile ?
Franchement non, car j’ai été très bien accueilli. J’étais très à l’aise avec les joueurs, on était tous ensemble dans une maison. J’étais le seul Français, donc ils étaient un peu intrigués, ils venaient souvent me voir, me posaient beaucoup de questions… Mon anglais s’est vite amélioré car j’étais obligé de parler anglais. Je ne vivais qu’avec des Anglais. L’adaptation s’est très bien passée.
Niveau football, tu as vu des différences entre la France et l’Angleterre ?
Oui. Comme tout le monde le dit, c’est beaucoup plus physique en Angleterre. Je n’ai pas eu trop de mal à ce niveau car j’avais un bon gabarit pour mon âge. Mais c’était un peu moins technique. À Paris, c’était très très technique ! C’est ça la différence : moins technique mais beaucoup plus physique.
Très intense surtout ?
Oui, très très intense. On courait beaucoup plus. Je suis arrivé, on commençait à courir… (Il soupire) J’avais plus trop envie de signer là-bas. (rires)
Tu étais à Leicester lors du titre de Premier League, en 2016. Tu as même vécu pendant un mois avec N’Golo Kanté…
N’Golo a dû m’héberger car j’avais eu une galère d’appart’. Il nous a hébergé mon frère et moi pendant un peu plus d’un mois.
Tu as gardé le contact avec des joueurs de Leicester ?
Oui, N’Golo, Riyad (Mahrez), on se parle toujours. Chez les jeunes, Ben Chilwell, Hamza Choudhury, Harvey Barnes, on est toujours en contact.
En 2017, tu files en Écosse, à Motherwell. À ce moment-là, tu n’as toujours pas de proposition en France ?
Non. Il y a juste eu un agent qui m’a contacté pour me dire qu’Orléans était intéressé. Je ne sais pas si c’était vrai, mais je devais signer à Motherwell le lendemain. J’ai préféré choisir le plan sûr.
Tu as découvert un nouveau football en Écosse ? Ou c’est comme en Angleterre ?
(Il coupe) Ah ouais, un autre football encore ! C’était encore plus intense qu’en Angleterre, donc t’imagines… (rires) Notre premier match de championnat était face aux Rangers. Franchement, l’intensité, c’était incroyable. Tu cours tout le match. Il n’y a pas de temps mort. En général, dans les matches, il y a un petit temps où les deux équipes « chill » un peu, gardent le ballon, tout le monde se repose un peu. En Écosse, il n’y a vraiment pas ça.
Ça te plaisait à toi ?
(Il réfléchit) Moi, j’étais plus excité parce que c’était ma première saison professionnelle. Avec un peu de recul, je me dis que c’était un peu trop. L’intensité, c’était vraiment trop. Je ne pense pas que j’aurais pu faire 2-3 saisons dans un championnat comme ça. Après, je pense que si tu joues dans une équipe comme le Celtic ou les Rangers, c’est différent. Car eux, ils ont le ballon. Avec Motherwell, il y avait beaucoup de courses.
Tu fais une grosse saison, assez pour être appelé avec les U23 de la Côte d’Ivoire. C’était un objectif ou c’est venu par hasard ?
C’était un objectif, mais je n’y pensais pas du tout à ce moment de la saison. Je pense que c’est grâce à Kolo Touré. Je l’avais croisé à l’aéroport d’Édimbourg, j’y déposais ma mère et je l’ai vu. Il était coach adjoint du Celtic. On a discuté. Il m’a demandé : « Pourquoi tu ne viens pas jouer pour la Côte d’Ivoire ? » J’ai répondu : « Je ne sais pas, on ne m’a jamais appelé. » Il m’a demandé mon numéro. Quelque temps après, il m’a rappelé avec le coach des U23. C’est comme ça que ça s’est fait.
Tout part de cette rencontre par hasard avec Kolo Touré ?
Oui oui ! Si on ne s’était pas croisés, je ne pense pas que j’aurais été appelé cette saison-là.
Tu viens de vivre une fin de saison cruelle avec Wigan et ce retrait de 12 points (l’équipe finit 23e, à 2 points du premier non-relégable, Barnsley). Comment l’avez-vous appris toi et l’équipe ?
On a un groupe WhatsApp avec tous les joueurs. C’était le lendemain de la victoire face à Stoke City (le 1er juillet, ndlr). On avait gagné 3-0, gros match. Et le lendemain, un gars de l’équipe envoie une photo de Sky Sports. « Wigan is going to administration. » On se dit : « C’est une blague ou quoi ? » Il commence à se dire qu’on va nous retirer 12 points. Tout le monde était choqué. On se disait que ce n’est pas possible. On espérait que ce soit pour la saison prochaine. Mais non, ils nous ont fait ça d’un coup. Personne n’a compris. Et là, on a vu que Sheffield Wednesday s’est fait retirer 12 points, mais pour la saison prochaine. On ne sait pas pourquoi… Il y a donc toujours ce sentiment d’injustice.
Vous saviez déjà que la reprise économique du club s’annonçait compliquée ?
On ne savait rien du tout. C’est pour ça que tout le monde était choqué. Il n’y avait aucun problème. En tout cas, nous les joueurs, nous n’étions au courant de rien. Après, le directeur sportif a commencé à nous dire qu’ils sentaient que, depuis un ou deux mois, ça tournait bizarre. Mais ils n’en ont parlé à personne. Nous les joueurs, on n’avait rien vu venir.
Vous étiez assez bien installés dans le milieu de tableau. Cette sanction bousille la saison en cours et met en péril l’avenir du club…
On avait fait une superbe deuxième partie de saison. On avait fini 13es je crois. Et là, ils nous retirent tout ça. Ça fait mal… Le club descend en League One. C’est chaud.
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Tu as senti un changement au sein du groupe après la nouvelle ?
Après la nouvelle, on a été plus soudés. Avec tous les bons matches qu’on venait de faire, même s’ils nous retiraient 12 points, il y avait quand même moyen qu’on puisse se maintenir. Nous, on donne notre maximum sur le terrain. C’était ça, l’objectif.
On vous a déjà parlé de comment la saison prochaine va se dérouler ?
Non, même pas. On sait juste que le coach est parti et que la reprise est le 12 (aujourd’hui, ndlr), mais c’est tout. Après, on a toujours pas été payés. Ils nous ont aussi dit qu’ils attendent de vendre à quelqu’un pour qu’on puisse recevoir notre paie.
C’est quasiment sûr que tu vas partir, non ? Ton nom aurait été soufflé en Premier League…
Mon objectif est de partir. Je n’aimerais pas trop jouer en League One. Après, il faut attendre la meilleure proposition pour moi. Je ne veux pas partir précipitamment. J’ai 23 ans et je pense que mon prochain transfert, ça doit être un qui pourra me propulser encore. Je prends mon temps, je suis relax.
La Premier League, c’est un objectif pour toi ?
Oui, ça a toujours été un objectif de jouer en Premier League. Mon but, c’était de le faire à 24-25 ans. Si je peux le faire à 23 ans, ce serait vraiment pas mal.
Tu aimerais jouer en France plus tard ?
Franchement, depuis que je suis arrivé en Angleterre, je kiffe. Mon objectif n°1, c’est l’Angleterre. Après, s’il n’y a pas de bon projet là-bas, mais qu’il y en a un en France, pourquoi ne pas aller en France ? Mais mon objectif premier reste l’Angleterre.
Merci à Cédric Kipré pour son temps accordé.
Crédit photo : PA Images / Icon Sport
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