Paco Bru, la légende du football espagnol qui a entraîné le Pérou | OneFootball

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·15 juin 2019

Paco Bru, la légende du football espagnol qui a entraîné le Pérou

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Joueur, arbitre, entraîneur, journaliste, Paco Bru qui a été le premier sélectionneur Espagnol a eu une vie palpitante. Figure incontournable du football espagnol, il a même entraîné le Pérou lors de la première Coupe du Monde de l’Histoire en 1930.


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L’équipe nationale péruvienne a eu, comme toutes les nations, de nombreux entraîneurs au cours de son histoire dont deux étaient Espagnols : les historiques Francisco Bru et Domingo Arrillaga. C’est le premier qui va nous intéresser. Après avoir été joueur, il a aussi été arbitre, journaliste puis il est devenu le premier sélectionneur de la Roja. Il a dirigé le Pérou pour sa première participation en Coupe du Monde en 1930 puis a continué sa carrière d’entraîneur en Espagne. Portrait de l’une des plus grandes figures du football espagnol.

Paco Bru, un madrilène en Catalogne

Né à Madrid le 12 avril 1885, c’est paradoxalement en Catalogne que va se dérouler sa carrière. Francisco Bru, plus connu sous le nom de Paco Bru, commence à 16 ans, à l’Internacional, une équipe de Barcelone où son frère Federico a également joué. Il évolue en tant que milieu de terrain et attaquant. Avec ce club, il remporte en 1904 la Coupe Torino, un trophée de seconde zone. Plus tard, il a défendu le maillot des deux grandes équipes de Barcelone : Le Barca et l’Espanyol. Avec le Barça, il joue défenseur et dispute 201 matches et marque 13 buts. Il remporte 3 championnats de Catalogne et la première Copa del Rey du club azulgrana en 1910. Avec l’Espanyol, il a remporté deux championnats en Catalogne. Dans une troisième étape à Barcelone, il a remporté un nouveau championnat en Catalogne. Il a également fait partie de l’équipe nationale catalane entre 1904 et 1915.

Une aventure féminine

Peu avant de prendre sa retraite, en 1914, Paco Bru commence à faire ses premiers pas en tant qu’entraîneur et le moins que l’on puisse dire c’est qu’il fait les choses en grand: il entraîne le Spanish Club Girl’s, la première équipe féminine d’Espagne. Engagé par la Fédération Féminine contre le Tuberculose de Barcelone il s’ engage à préparer en 45 jours seulement, un groupe de filles pour jouer des matchs de charité. Bien que certains journaux aient choisi de soutenir le sport féminin, d’autres secteurs sociaux n’ont vu chez ces filles footballeuses que des garçons manqués. Bru leur donne des leçons tactiques pour les familiariser avec les règles et les prépare physiquement. Il exige qu’elles jouent en short et qu’elles se lavent ensemble, ce qui provoque des plaintes des parents, des frères et sœurs, des maris et des petits amis. Mais Bru fait la sourde oreille : les choses se font à sa manière ou pas du tout.

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Alors qu’aucun club masculin ne veut les affronter à ses débuts le 9 juin 1914, Paco décide de diviser les filles en deux équipes : Montserrat et Giralda. Les débuts sont plutôt bons et, malgré les critiques des médias, d’autres matches ont été organisés. Dans les journaux on parle surtout du peu d’enthousiasme pour le jeu des filles. Néanmoins, trois matches ont été disputés à Palma, deux à Sabadell, trois autres à Valence, un à Reus, un autre à Tarragone et un autre à Pampelune pendant les Sanfermines Si les prévisions se réalisaient, ils joueraient même dans le sud de la France. La tournée n’aurait pas pu mieux commencer. À Sabadell le succès est au rendez-vous et on trouve même de bonnes critiques dans les journaux. La tournée continue jusqu’au dernier arrêt : Pampelune. Les festivités de la San Fermín étaient une grande opportunité pour les filles mais malheureusement, ils n’ont jamais fait ce voyage, le déclenchement de la Première Guerre mondiale forçant à suspendre la tournée et le Spanish Club Girl’s est démantelé. Mais la carrière de Paco Bru ne fait que commencer.

Suite à sa retraite à 31 ans en 1916 Francisco se tourne vers l’arbitrage. Il existe une légende le concernant selon laquelle il aurait arbitré son premier match avec un revolver. Interrogé la dessus par un joueur, il lui aurait répondu que pour son premier match en tant qu’arbitre, il voulait la paix. Il arbitre également les finales de la Coupe du Roi de 1916 et 1917 et devient Président du comité des arbitres de Catalogne.

L’instigateur de la Furia Roja

En tant que footballeur on devinait déjà chez Paco des manières d’entraîneur. Lorsqu’il était joueur et capitaine du Barca il interdisait à ses coéquipiers de sortir et de boire de l’alcool pour qu’ils soient le plus en forme possible. Suite à cela le physique est devenu un pilier sur lequel il a construit sa philosophie d’entraîneur. En 1920, il devient le premier entraîneur de l’Espagne. Au début, il a été décidé que trois hommes en seraient responsables : José A. Berraondo, Julián Ruete et lui-même mais, au final, Bru est resté seul à la tête du projet. Ce n’était pas le seul obstacle sur le chemin des Jeux Olympiques d’Anvers. Le gouvernement espagnol refuse d’aider financièrement la sélection et de nombreux joueurs se sont opposés à l’idée d’assister à des matches d’entraînement avant le tournoi. Cependant, Paco Bru est un homme expérimenté, et ces contrariétés ne vont pas le décourager.

Il construit une équipe forte, combative et solide avec une base de joueurs basques. « Sans les Basques, il n’y a pas d’équipe espagnole« , a-t-il dit à Ruete. En Belgique, le jeu se joue sur l’herbe et les joueurs du nord avaient l’habitude des combats, des longs ballons et des débauches d’énergies. S’ils devaient perdre ce ne serait pas par manque de physique. Il fait également la sourde oreille aux critiques pour ne pas avoir choisi un seul joueur madrilène. Il a enduré la pluie de protestations à cause de l’appel de Ricardo Zamora. Mais son attitude a convaincu le Marquis de Villamejor, président du C.O.E., de soutenir le projet avec 125.000 pesetas de sa poche.

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Une fois à Anvers, Paco Bru montre qu’il ne se souci que de ses joueurs. Il n’a pas écouté les plaintes du trésorier fédératif Luis Argüello lorsque, à l’instar des Américains, les footballeurs ont organisé une mutinerie contre le Comité olympique : en effet, ils ont parcouru la moitié de l’Europe en troisième classe, ils ont été installés dans un orphelinat où des joueurs ont dû dormir dans des lits pour enfants, ils n’avaient que deux douches pour 20 hommes et ils ne possédaient même pas un terrain d’entraînement dans les environs. À cela s’ajoutait l’embarras de défiler lors de la cérémonie d’ouverture avec les maillots rouges en l’absence des chandails comme le reste des équipes.

Ces difficultés, cependant, ont uni le groupe et la Furia Roja redoutée était née. L’Espagne fait une belle compétition et l’expédition retourne en Espagne avec la médaille d’argent ce qui est le premier succès international pour les Ibères. Le roi Alphonse XIII se rend même à la gare pour les recevoir. Cependant, l’Assemblée fédérative décerne une médaille d’or à Ruete et Berraondo qu’elle juge comme les vrais responsables du bon résultat de la sélection. C’est seulement longtemps après qu’ils ont accepté de la donner également à Paco, le véritable alma mater de la Furia Roja.

Entraîner le Pérou, une mission de 45 jours

Suite au jeux olympiques, Paco reprend sa carrière d’arbitre jusqu’en 1924. Cette année-là il se lance en tant qu’entraîneur et dirige le R.C.D. Espanyol de Zamora. Il entreprend une tournée des Amériques qui devait être courte au départ, mais qui va durer finalement plusieurs mois. Les bons résultats obtenus en Argentine et en Uruguay conduisent l’équipe au Chili, au Pérou et à Cuba. D’après certaines légendes, il paraîtrait que l’expédition a traversé à dos de mulet une partie des Andes escarpées.

Au Pérou, on lui propose d’entraîner l’équipe nationale et de faire découvrir le football aux plus jeunes, mais Bru décline l’offre. Il décide de rester à Cuba pour diriger le Club Juventud Asturias pour une saison et ne rentre pas avec l’Espanyol. C’est lors de la Coupe du Monde de 1930 en Uruguay, la première de l’histoire du football, que sa route va croiser une seconde fois le Pérou. L’histoire n’aurait pas pu être plus extravagante.

Il est engagé 45 jours avant le début de la compétition et quand Bru veut voir les joueurs avant de dresser la liste, la Fédération lui annonce qu’elle les a déjà choisis pour lui. Ils ne disputent qu’un seul match amical avant de se rendre en Uruguay, qu’ils perdent sut le fil à Lima face à Olimpia (Paraguay). Pendant les phases de groupe de la Coupe du Monde, le Pérou s’incline 3-1 face à la Roumanie et 1-0 face à l’Uruguay et est éliminé dès le premier tour. Paco Bru n’aura pas pu reproduire le miracle des Jeux Olympiques. Il revient néanmoins satisfait en Espagne car de son point de vu il a fait de son mieux compte tenu des circonstances.

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Galères en Amérique

Son aventure américaine avait encore une dernière étape, la plus mouvementée. En raison de ses grandes connaissances, en 1931, les managers désespérés du club espagnol Racing Madrid décident de l’engager pour mener une tournée en Amérique qui sauverait le club de la faillite. En effet, ce club qui voulait concurrencer le Real Madrid venait de s’endetter gravement pour construire un stade qui concurrencerait Chamartín.

Il faut ajouter aussi que suite à la création de la Liga, le Racing fait partie de la deuxième division et qu’il descend en troisième à cause de ses mauvais résultats. Mais le club se refuse à descendre et fait front face à la Fédération Régionale du Centre (ancêtre de la Fédération Castillane de Football qui gérait le foot dans la région de Madrid) ce qui aura pour conséquence de faire descendre le club au niveau Régional, signant son arrêt de mort. Le club décide donc de faire cette tournée américaine pour encaisser de l’argent et se sauver. Cependant, pour quitter l’Espagne il faut avoir la permission de la Fédération Régionale du Centre, qui elle n’est pas prête à la donner après le refus du club de jouer en troisième division. Qu’a cela ne tienne, le club décide de partir quand même.

Paco et sa participation au coup d’état péruvien

Paco était un ami proche de Germán Marquina, ancien président de la Fédération péruvienne, qui a été destitué lorsque le général Sánchez del Cerro a quitté la présidence de la République. Le général s’est vu refuser la possibilité de retourner dans son pays, et il voulait à tout prix se présenter comme candidat à une nouvelle élection. Un jour, alors qu’il était à l’aérodrome de Barcelone, le général péruvien est arrivé de Madrid, et Paco lui offre l’hospitalité en Espagne. Il se rendait à Paris dans l’espoir de trouver un soutien économique pour sa campagne électorale.

Un peu plus tard, quand il part pour l’Amérique, le hasard fait que le vieil ami de Paco Germán Marquina monte lors de leur escale à Vigo lorsque le bateau accosta. Ils firent le trajet ensemble, et arrivèrent en même temps dans le port panaméen de Colón, où le général Sánchez del Cerro attendait Germán. Après s’être salués, les trois hommes vont manger ensemble. Au cours de l’après dîner, le général demande à Paco s’il avait le moindre inconvénient à amener trois lettres à Lima, en expliquant brièvement leur contenu. Il avait besoin de l’autorisation du gouvernement pour entrer au Pérou, et ces missives visaient à provoquer des révoltes et des agressions, tant que le gouvernement n’était pas d’accord pour lever la sanction. L’un des écrits était adressé au directeur de l’École des cadets de Chorrillo, un autre au chef supérieur de la police de Lima, et la dernière lettre au directeur de l’École d’hydroaviation installée à Ancón.

Forcé par son amitié avec l’ancien président de la fédération et passant par dessus sa peur, Paco accepte. Quelques jours plus tard, il arrive au port d’El Callao, avec les documents cachés sous ses chaussettes. Paco Bru remet les lettres et quelques jours après, lorsqu’il se réveille il se rend compte que les troupes s’étaient rebellées. Il n’a même pas entendu les rares coups de feu entre les différentes fractions. À peine une heure plus tard, le gouvernement a autorisé l’entrée de Sánchez del Cerro.

La tournée vire au cauchemar

Du côté footballistique, le Racing enchaîne les défaites au Pérou. Quand ils arrivent à Cuba ils sont à nouveau au milieu d’une révolution, cette fois celle de Machado. Des coups de feu, des consignes de sécurité pour accéder aux stades et des révoltes les obligent à annuler certaines matchs ce qui prive le club des recettes des rencontres. Au Mexique, alors que la tournée semblait aller mieux et que l’équipe reprenaient le chemin de la victoire, tout s’est mal passé lors d’une revanche contre Atlante. Ce club avait une réputation de jouer très dur et souvent au-delà du règlement. En vertu de quoi, sachant qu’il restait des matchs à jouer à New York, Paco Bru demanda à ses joueurs d’éviter les contacts pour ne pas se blesser.

Le jour du match comme prévu Atlante joue dur et mène par 3-1. Les hommes de Paco décident alors de balancer chaque ballon hors du stade. Des actes qui sont pris pour une moquerie et un manque de considération par les supporters qui entrent sur le terrain pour les lyncher. L’ancien sélectionneur doit retirer l’un des ses joueurs du terrain parce qu’une pierre lui a ouvert un trou dans la tête. Les joueurs parviennent à fuir mais finissent par être emprisonnés par les autorités mexicaines. Ce n’est que grâce à l’intervention du directeur de l’hôtel où ils séjournaient, également avocat, qu’ils ont pu sortir de prison. Mais non sans avoir d’abord payé une onéreuse caution.

La tournée, interminable, fait une dernière escale aux États-Unis dans une ville de New York ruinée par la crise économique de 1929. Les joueurs du Racing jouent contre des rivaux sans prestige pour récolter des fonds et payer le billet de retour pour l’Espagne. Mais les recettes ne suffisent pas alors l’équipe continue de programmer des matchs. Les misères continuent quand le promoteur de la tournée lâche l’équipe aux Etats-Unis. Les recettes engrangées par les différentes rencontres ne permettaient pas à tout le monde de revenir. Finalement, c’est la Fédération Régionale du Centre qui, rappelons le leur avait interdit de partir, qui prend en charge le rapatriement de l’équipe. Celle-ci leur impose une très grosse amende et les descend d’une division ce qui va causer la disparition du club.

Une fin de carrière en Espagne

Après ses déboires outre-Atlantique Paco Bru va connaître le succès en tant qu’entraîneur. En 1934 il prend en charge le Real Madrid (connu à l’époque comme le Madrid FC) et va gagner la sixième et septième Coupe du Roi du club (1934-1936) après 17 ans d’attente. La carrière de Bru au Real Madrid aurait pu être plus fructueuse, mais la guerre civile espagnole éclate et il est contraint de repartir en Catalogne (il n’est pas très bien vu à Madrid pour avoir appelé des joueurs basques pendant son mandat à la tête de la sélection espagnole). Il dirige Girona (1937-1939), puis retourne au Real Madrid (1939-1941) une fois le conflit terminé. Après un an à la tête d’un Real Madrid épuisé, il a signé à Grenade. En deux saisons en tant qu’entraîneur des Andalous l’équipe obtient un record de 20 victoires consécutives qui est resté invaincu pendant 75 ans.

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Il continue son parcours en tant qu’entraîneur une saison à Malaga, une saison à Saragosse (1948-1949) et une autre à Cordoue (1951-1952) mais sans grand succès. Suite à cela l’ancien sélectionneur prend sa retraite d’entraîneur. Sa carrière sur les bancs terminée, il devient par la suite dirigeant de club. Paco occupe le poste de secrétaire technique de l’Espanyol et en 1953, il est nommé secrétaire technique de Plus Ultra, poste qu’il va occuper jusqu’à sa mort. Il rend son dernier souffle le 10 juin 1962 à l’âge de 77 ans.

Paco Bru reste encore aujourd’hui comme l’une des plus grandes figures de l’histoire du football espagnol. Touche à tout il aura été joueur, arbitre, entraîneur et journaliste. Sa vie était entourée de légendes. On dit aussi qu’il travaillait dans un cirque comme homme fort et en 1910, il établit le record d’Espagne pour le lancer du disque. Il a eu une longue carrière d’entraîneur et a été un innovateur dans le domaine. Il estimait que tout ne devait pas tourner autour du ballon et mettait un point d’honneur sur la discipline et le travail physique pour améliorer ses compétences sur le terrain. Pour beaucoup il restera simplement et à jamais le premier sélectionneur de la Roja et l’instigateur de la Furia.

Miguel Hernandez

@Mig19Hernandez

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